Isabelle Bellerose avait grandi dans une famille nombreuse, dans le bonheur insouciant d'une belle demeure et avec des parents toujours présents pour leur progéniture. C'était l'image qu'elle avait depuis son plus jeune âge de la félicité, de ce que devrait être sa vie quand elle serait à son tour une femme mariée. Avoir des enfants, c'était ce qui faisait totalement une femme et elle voulait une aussi grande fratrie que la sienne. Un conte de fée sans prince n'existant pas, elle fit la rencontre du sien lors d'un voyage de six mois en Angleterre pour ses études. Il avait tout pour plaire, plus âgé, beau et grand, venant d'une famille ayant une certaine notoriété. C'était lui, elle l'avait compris dès leur premier regard. Arthur Chamberlain deviendrait son époux, elle en était certaine. Quatre ans plus tard, c'était devenu la réalité. La vie avait tout pour être parfaite, ne manquait plus que cet enfant dont ils avaient tant envie. Mais avec les années, l'espoir s'amenuisait, les tentatives échouaient chacune les unes après les autres. Leur destin semblait de ne pas connaître ce bonheur pourtant si facilement atteint par beaucoup d'autres. À trente-huit ans, elle n'avait plus la force de tout refaire encore une fois le difficile chemin pour une nouvelle tentative. Accepter cela n'avait pas été facile, mais doucement et avec tristesse, elle avait fait le deuil de bébé fantôme. Avec son époux, ils avaient enfin pu se retrouver, un peu comme des jeunes mariés. Tout rentrait enfin dans l'ordre, jusqu'à ce jour, où ce rendez-vous à littéralement mit le chaos dans son existence qui venait tout juste de retrouver sa stabilité. « Vous êtes enceinte, Mme Chamberlain, félicitations. » Trente-neuf ans, pratiquement quarante, cela était tout bonnement un miracle. Son rêve allait enfin se réaliser. Bien entendu, en son cœur un pincement persistait, celui que rien n'était joué et que ce trésor pouvait s'envoler en un rien de temps. Mais se laisser abattre n'étant pas dans son caractère, elle continua sa vie tranquillement tout en faisant tout de même attention à la demande de son mari qui lui-même n'arrivait pas à y croire. Enfin, ils allaient enfin pouvoir goûter au bonheur que de nombreux de leurs amis avaient déjà eu la chance de connaître et cela doublement. Le choc avait été de taille quand on leur avait fait cette annonce, il n'y avait pas un, mais deux embryons. Deux enfants, c'était tout bonnement incroyable, surtout après avoir attendu tellement d'années avant d'accepter qu'on en aurait jamais. Les mois suivants ont été un pas de plus vers le futur rôle de maman, ce ventre qui s'arrondissait avec à l'intérieur deux petits êtres qui seraient choyés comme il le fallait. Malgré cette peur toujours enfuie en elle, Isabelle savait tout allait se passer pour le mieux, c'était tout simplement écrit. Puis ce vingt-huit mai est arrivé, les douleurs de l'enfantement firent enfin leur apparition et cela malgré le fait que l'accouchement devait avoir lieu plus d'un mois plus tard. Tout avait été prévu, que ce soit la chambre dans l'une des meilleures maternités du pays et le patricien qui mettrait au monde les deux enfants. La douleur était insoutenable, mais c'est avec toute la conviction qui lui restait qu'elle refusa tout ce qui aurait pu l'aider à mettre fin à son calvaire, elle voulait tout ressentir. À vingt-trois heures quarante-trois, un premier se fit entendre dans la salle d'accouchement, celui d'un nourrisson qui semblait être minuscule. « C'est une fille. » Les larmes, la joie de voir son enfant en bonne santé et surtout la fierté de se savoir maman d'une petite demoiselle. Un petit être comme elle, avec qui elle pourrait partager tant de choses. Un regard rapide avant que la douleur revienne et que dix minutes plus tard, l'amour l'envahisse encore une nouvelle fois. « Un garçon... Vous avez bien fait les choses, le choix du roi. » Le baiser de son mari sur son front, les battements frénétiques de son cœur et cette sensation grisante d'avoir enfin réalisé son plus grand rêve. La suite n'est plus que brouillard, elle se rappelle juste avec une justesse presque effrayante de la sensation de la peau de ses bébés sur sa poitrine pour ce peau à peau dont elle avait tant attendu parler. Maintenant, elle était mère, ils en étaient la plus grande et la plus belle des preuves. « Bienvenue Lilou-Belle et Lucas-Gabriel. » Aujourd'hui, tout était enfin parfait.

Deux petites silhouettes, côte à côté, main dans la main. La couleur chatoyante de leur chevelure attirait les regards depuis leur plus jeune âge, surtout quand ils se retrouvaient ensemble. Les jumeaux Chamberlain avaient eu une vie tout ce qu'il y avait de plus simple, heureuse jusqu'à ce que tout bascule un jour d'été, peu avant leur entrée au collège. Ils avaient toujours été spéciaux, ils leur arrivaient de faire parfois des choses étonnantes, mais c'était quelque chose qui n'avait jamais alerté leurs parents. Jusqu'à ce que cet homme se présente à leur porte avec une nouvelle plus qu'extraordinaire. Sa tenue avait bien entendu fait tiquer le couple, ce pantalon d'une couleur jaune criarde et cette chemise violette, le style vestimentaire laisser bien entendu plus qu'à désirer. « Puis-je rentrer, j'ai une annonce à vous faire. » Bien que perplexe, le père de famille l'avait laissé entrer avant de lui montrer le chemin du salon où se trouvait sa femme et ses enfants. Le silence avait été de mise pendant que chacun s'observait avant que l'inconnu ne s'installe. Ses manières étaient tout aussi étranges que lui, il tenait dans sa main deux enveloppes faites d'une matière peu commune. « Je me présente, Alistair Mortensen, employé au ministère de la magie et j'ai été envoyé chez vous pour vous parler de ses jeunes gens... Hum, Lucas-Gabriel et Lilou-Belle. » L'homme n'avait pas fait attention au fait qu'il avait perdu le couple devant lui quand il avait prononcé le mot « magie », cela était une chose assez commune quand il avait affaire à des moldus. Sa patience était une qualité non négligeable dans l'exercice de ses fonctions. En tout cas, les futurs élèves avaient l'air d'attendre la suite de son discours. « Je suis ici pour vous annoncer que vos enfants ont une place depuis le jour de leur naissance, le vingt-huit mai mille neuf cents quatre-vingt-quinze à respectivement vingt-trois heures et quarante-trois minutes et vingt-trois heures et cinquante-trois minutes, une place dans l'école de sorcellerie Poudlard. C'est le meilleur établissement qui existe dans le pays, d'ailleurs Monsieur, votre arrière-grand-père a eu la chance de rencontrer notre premier ministre lors de son mandat et avait connaissance de certaines choses de notre monde. » L'air ébahi d'Arthur Chamberlain aurait pu faire rire n'importe qui le connaissant, mais pour le moment il devait accepter le fait qu'on ne lui racontait pas de sornette. Tout cela semblait tellement fou, même si cela expliquait finalement beaucoup de choses. Son épouse ne semblait pas très réceptive pour le moment. Quant à Lilou et Lucas, ils n'avaient pas bougé d'un pouce, attendant très certainement la suite. « Pour vous, bien entendu je serais là pour vous aider dans les achats que vous aurez à effectuer pour vos enfants. Nous avons un endroit qui fournit tout cela, vous verrez, rien de bien difficile. » Il tendit les deux lettres avant de les poser sur la table basse en voyant qu'il n'y avait aucune réaction de la part de ses interlocuteurs. Bien entendu, la nouvelle n'était pas facile à entendre, mais les enfants avaient bien entendu montrer des signes de magie avant ce jour. Pour des gens terre à terre, c'était comme-ci on disait que le Père-Noël existait réellement. Se retournant vers les jumeaux, un petit sourire aux lèvres, Alistair pencha la tête d'un air conspirateur. « Vous verrez, cette école est exceptionnelle et je vous jure que vous y vivrez les plus belles années de votre vie. Si vous avez des questions, j'y répondrais volontiers, mais pour le moment je dois vous quitter pour aller dans une autre famille pour y faire la même annonce. Je vous dis à bientôt, madame, monsieur, bonne journée. » Aujourd'hui, quelques semaines plus tard, Lili et son frère se retrouvait sur ce quai de gare qui allait les mener dans ce château dont leur avait parlé l'homme, la locomotive écarlate lâchant quelques volutes de fumée. Ce moment avait un côté terrifiant, mais tellement emballant. Pour la première fois de leurs existences, ils allaient partir loin de leurs parents et n'allaient pas les voir pendant quelques mois. Derrière eux, ils sentaient leur présence, mais tout ce qui comptait c'était eux pour le moment. « Prêt pour l'aventure ? » La petite voix de Lilou avait résonné et son frère avait acquiescer avant qu'ils ne montent enfin dans l'un des compartiments vers un nouveau chapitre de leurs vies.

« Chamberlain, quel déplaisir de te croiser. » La voix était de l'une de celle que Lili craignait d'entendre chaque jour que Dieu faisait, mais la chance encore une fois n'était pas de son côté. Elle qui voulait seulement un peu de solitude pour finir son livre, n'avait pas choisi le bon endroit. Parfois, il lui arrivait même de se demander s'il n'avait pas jeté un sort sur sa personne afin de toujours savoir où elle se trouvait, mais cela ne devait pas être à sa portée. Tout en laissant ses yeux courir sur les mots, sa réponse se fit entendre. « Le déplaisir est partagé, va donc rejoindre tes amis ou tout du moins ta bande de singe avec un uniforme. » La colère la tenaillait, elle savait très bien pourquoi il l'avait pris en grippe depuis son arrivée ici, mais contrairement à beaucoup elle avait fait le choix de ne pas se laisser faire. Poudlard était un endroit qui aurait pu être merveilleux si certain n'était pas aussi buté et pensait que les gens comme elle ne méritait pas de se retrouver dans cette école. La discrimination était une chose intolérable, mais elle en était l'objet. « Un peu plus de respect, garde ton venin pour toi. » Un petit rire passe ses lèvres pendant que ses yeux quittent les pages de son livre pour se tourner vers lui, ce tyran qui fait de sa vie un véritable enfer. « Mes parents m'ont appris que le respect était une chose importante, si l'on ne m'en témoigne pas j'ai le droit de faire de même. Alors, pour toi, il est aussi bas que le niveau de l'herbe. » Il n'avait pas l'air d'apprécier, comme à chaque fois qu'elle lui répondait de cette manière, mais cela lui importait vraiment peu. Pourquoi devrait elle se sentir inférieure, elle aussi avait sa place ici. Une chose était certaine, maintenant elle n'avait plus qu'à rejoindre le château pour trouver un autre endroit pour finir son chapitre. Une fois debout, elle lui lança un regard dédaigneux avant de prendre le chemin du château, mais sans même s'en rendre compte, son corps se retrouva coller au tronc d'un arbre, une douleur horrible tenaillant son poignet gauche. « Je n'ai pas eu le temps de m'amuser, tu ne vas pas partir maintenant, sang-de-bourbe. » Lili bouillait de rage et sans le vouloir, son pied écrasa celui de son agresseur qui cilla à peine avant de lui sourire. « Doucement, tigresse, j'aime quand tu cherches à m'échapper. » Pour une sorcière plutôt intelligente, elle ne l'avait pas été sur ce coup-là, encore moins quand elle avait fait le choix de laisser sa baguette dans son sac de cours. La situation était plus critique qu'elle ne l'avait jamais été, après tout il avait toujours eu une forme de violence verbale envers, physiquement aussi parfois, mais cela n'avait jamais été aussi loin. Elle pouvait se l'avouer silencieusement, elle avait peur, comme elle n'avait jamais ressenti ce sentiment auparavant. Il était là, tellement près qu'elle pouvait sentir son souffle contre sa peau et cette douleur qui glissait dans son bras. La grande question était de savoir ce qu'elle pouvait bien faire pour sortir de cette situation. Hurler ? Personne ne l'entendrait, ils étaient beaucoup trop loin de l'établissement. Le frapper ? Elle avait de la force, mais certainement pas pour faire le poids contre lui. Vraiment, elle ne savait pas quoi faire. Cela avait l'air de lui plaire, son regard glissait sur son corps d'une manière qui ne lui plaisait pas du tout. « Je n'avais jamais remarqué, tu es plutôt bien foutu pour une fille dans ton genre. » Loin d'être un compliment, cette phrase lui donnait envie de vomir, ce qui serait peut-être une manière de l'éloigner. Une idée vint tout doucement s'immiscer dans son esprit, c'était complètement dingue, mais elle n'avait rien d'autre sous la main pour le moment. Il n'allait pas du tout s'y attendre, après tout, qui aurait pu y penser ? Personne. « Tu as peur d'être souillé ? C'est dommage, mais je suis plutôt heureuse de ma condition, faire quoi que ce soit avec toi est dans la liste des cauchemars les plus horribles que je pourrais faire. » Comment le mettre en rogne, première leçon, il n'appréciait vraiment pas en tout cas qu'elle est pu lui dire quelque chose de ce genre. Aucune fille ne pouvait lui résister, elle l'avait bien remarqué avec les années, chacune était un trophée. Beaucoup de sang-pur, à l'occasion une sang-mêlé, mais jamais des nées-moldus. Approchant doucement son visage du sien, elle scruta sa réaction avant de poser ses lèvres sur les siennes, sacrifier son premier baiser allait peut-être lui permettre de s'en sortir. Ce n'était pas ainsi qu'elle l'avait rêvé, mais c'était ainsi. Mais sincèrement, elle ne s'attendait pas une seule seconde à ce qu'il lui réponde et pendant un instant elle oublia totalement ce plan qui avait germer dans son esprit. Pourquoi est-ce qu'il lui faisait ressentir ça ? C'était totalement impossible, il ne pouvait pas faire naître en elle se genre de sensation. Reprenant ses esprits, Lili releva avec force son genou qui atteignit son objectif. Elle était enfin libre. « La prochaine fois, fait attention, tu pourrais perdre beaucoup plus qu'un peu d'amour propre. Passe une bonne journée. »